Pages

24 déc. 2009

Didon; reine de Carthage, écrit mai 2007

medium_mosaique_Didon-Enee.2.jpg« Va, rejoins l'Italie au gré des vents ; cherche ton royaume au-delà des mers. / Mais, si les dieux justes ont quelque pouvoir, tu connaîtras, je l'espère, / le fond des malheurs au milieu des écueils, et souvent tu évoqueras / le nom de Didon. Absente, je te poursuivrai de sombres feux / et, lorsque la froide mort aura séparé mes membres de mon âme, / je serai là, ombre partout présente. Tu seras châtié, cruel ! / Je l'apprendrai ; la nouvelle m'en parviendra chez les Mânes infernaux. » (Énéide, IV, 381-387, trad. A.-M. Boxus, BCS)

La Tunisie romaine a le mérite de mettre en valeur l'une des femmes les plus inouïes et les plus romantiques, selon nos critères occidentaux: elle se suicide par amour pour le bel Énée!

medium_mortdid.2.jpg
Ce drame de Didon et Énée, pour ceux et celles qui ont reçu une culture classique, vous le connaissez grâce à l'étude ou la lecture de Virgile, moi ma grande source d'inspiration c'est la musique et la peinture: Purcell et Rubens.

La Légende:

Lorsque Enée, prince troyen, atteint au cours de son périple, le sol africain, il est accueilli par Didon, Reine de Carthage.
Une grande passion naît entre Enée et la reine Didon. Trop rapidement, les Dieux de l'Olympe rappellent à Enée qu'il doit reprendre son voyage car il a un destin à réaliser : fonder'une grande ville, Rome.
Enée quitte la mort dans l'âme Carthage pour obéir aux Dieux.
Incapable de supporter cet abandon, Didon se donne la mort sur un bûcher, tout en se poignardant.
medium_elissarqueen1.jpg

Cette Didon porte un autre nom, celui de Elissa, princesse de Tyr qui fut obligée de fuir sa ville en raison de la jalousie et de la cupidité de son frère Pygmalion. Elle aurait fui jusqu'aux côtes de l'Afrique et s'est installée avec ses fidèles dans un endroit qui respirait la Paix, sur la colline de Byrsa, près de Carthada, ou Karth haddash traduction de " ville nouvelle " en Phénicien, qui avait été fondée 4 siècles auparavant en - 1259 par ces mêmes Phéniciens.


Ce drame de l'amour tragique a inspiré bien des artistes et reste associé à l'éternelle passion amoureuse. Carthage reste une inspiration pour tous les écrivains et les amoureux de la femme éternelle. Un de mes amis tunisiens, grand voyageur et bloggeur a écrit une très belle page sur Didon alias Elissa:

"Persuadée d’être l’épouse légitime d’Enée, Didon crie vengeance en assistant au départ du Prince. Une seconde ruse germe dans sa tête. Anna est mise au secret et toute une tragédie se met en marche. A pas lents et saccadés...

Didon ordonne la construction d’un grand bûcher pour brûler les habits de l’impie dit-elle.

Les flammes sont hautes et rugissantes. La chaleur est étouffante ; sept marches de pierres taillées mènent au sommet du bûcher. L’épée à la main droite et les habits du lâche dans la main gauche elle gravie doucement les marches faisant fis des flammes qui lèchent dangereusement sa peau si blanche et si fine…

La foule demande à la souveraine de jeter bien vite les habits d’Enée au feu et de redescendre… Sans broncher ni plier elle arrive à la septième marche, fait face à ses sujets et de son bras musclé elle dégaine dangereusement la pointe de l’épée du Dardanien qui effleure sa poitrine…

Altière, elle est secouée par le bruit du silence et habillée par les yeux de la foule!Effarée, honteuse de son cruel destin, un éclat sanglant dans les yeux, les joues tremblantes et parsemées de taches, pâle d’une mort prochaine, Didon, jette, pose parterre, les vêtements de son amant.

Elle se jette soudain sur eux, sur cette couche familière et dit :

« Vêtements chers à mon cœur, tant que le destin et les Dieux le permettent, recevez mon âme et délivrez-moi de mes tourments, j’ai fini de vivre et j’ai accompli la course que le destin m’a accordée. Maintenant c’est une grande ombre qui va aller sous terre. J’ai bâti une ville magnifique,Carthage, j’ai vu mes remparts, j’ai vengé mon mari et puni mon frère meurtrier. Je serai encore plus heureuse, si heureuse, si les vaisseaux dardaniens n’avaient pas touché les côtes de Carthage. »

Le geste suit la parole. L’épée transperce ce corps voluptueux que les flammes embraseront à la seconde…

Là-haut dans le ciel une autre reine est déjà au courant de l’arrivée de Didon. Cléopâtre l’Egyptienne qui partit avec ses deux confidentes par la morsure volontaire d’une vipère, pour fuir également la lâcheté d’un homme, César. Elle qui aima ensuite Antoine aura régné sur la Méditerranée orientale laissant la partie occidentale à Didon.

Les deux belles reines, indirectement victimes de Rome, se retrouveront sûrement et auront plus d’une vie pour parler des hommes et leur destin de femmes" R.T. dit El Greco

En attendant, de nos jours, Elissa comme Didon inspirent les femmes tunisiennes:

Extrait de "Carthage, sa trace, son écho", Leïla Ladjimi Sebaï, grande spécialiste de l'Afrique proconsulaire et des femmes dans ce temps pariculier:
Si l'histoire d'une nation est dominée par les légendes qui s'y rattachent, celle de la Tunisie est liée au destin d'Elissa. Elle fut la fondatrice d'une ville et surtout d'un empire qui allait, pendant de nombreux siècles, dominer tout le monde méditerranéen. Son nom et celui de Carthage sont si étroitement liés que la légende s'en est emparée.

Ce destin exceptionnel a durablement impressionné historiens, écrivains et poètes. Celle que les premiers Africains appelaient Didon (l'errante) fut l'héroïne de l'Enéide. De Virgile, le plus grand poète de l'Antiquité romaine, jusqu'à Léopold Sedar Senghor, l'histoire de Carthage, immense et tragique, associée au destin d'une femme exceptionnelle, ne cesse de susciter les interrogations et de déclencher les passions."

medium_titre_61500.jpgEt en 2004 le nom d'Élissa a inspiré une belle initiative pour la paix, La route d'Elissa, course féminine à la voile en Méditerranée. Lors de la deuxième édition qui a eu lieu l'an dernier, avec pour départ le port de Sidi Bou Saïd (Tunis) le 13 août 2006, le Liban était à feu et à sang et ce fut l'occasion pour le Mr. Shashi Tharoor, Secrétaire général adjoint des Nations Unies de prononcer ce beau texte:
"L’actualité récente au Proche-Orient et particulièrement au Liban, ne permet pas à La Route d’Elissa de se dérouler comme prévu. Trois mille ans plus tard, la guerre et la destruction rendent le retour symbolique d’Elissa chez elle encore impossible.

Nous aurions pu choisir la facilité et trouver une autre destination ou même simplement ajourner La Route d’Elissa. Mais comment se détourner du pays natal d’Elissa et l’abandonner ainsi à son triste sort. Comment trahir l’âme de cette course qui, au-delà de son caractère sportif, a pour spécificité de s’ancrer sur des valeurs fortes : paix, partage, solidarité, développement… celles-là même qui sont aujourd’hui, plus que jamais, en péril.

La Route d’Elissa partira donc bien de Carthage le 13 août 2006. Un lieu, une date dont la symbolique est d’autant plus forte et importante aujourd’hui.

Parce que Carthage, qui fut conquise pacifiquement par la Reine Elissa-Didon, a été et demeure une ville d’échanges et de coexistence, entre les peuples, les religions, les cultures et que sa vocation, aux carrefours de la Méditerranée, en fait une ville symbole de partage et de paix.

Le 13 août, parce que c’est la journée nationale de la femme tunisienne qui fête cette année son cinquantenaire, pour mieux rappeler le rôle que les femmes, depuis Didon jusqu’à nos jours, ont à jouer en faveur de la paix, du dialogue et de la prospérité.

Les « filles d’Elissa » s’élanceront donc de Carthage, non pour aborder vers les rivages encore troublés de son pays natal, mais pour reprendre comme un flambeau son message de paix et le porter, à travers la mer, aux quatre coins de la Méditerranée. Ainsi, chaque bateau se dirigera vers un grand port du pourtour méditerranéen, en Espagne, en France, à Monaco, en Italie...." Lire la suite
La prochaine course aura lieu en 2008, nous vous y convions.

Dans l'immédiat et plus prosaïquement, nous vous invitons à visiter le site d'artisanat tunisien de Mégrine:
Didon

Aucun commentaire: